
La rançon de l’échec: l’apprentissage
2019-11-25
3 minutes
Nicolas Chevrier
Psychologue

Dr Nicolas Chevrier
Psychologie du travail
Au Québec, on a tendance à avoir peur de l’échec. Une propension occidentale, me direz-vous. L’impression que ma valeur comme individu est équivalente à mes succès professionnels est malheureusement très répandue. Dans un tel contexte, vivre un échec peut faire vivre de grandes émotions. Les revers devraient pourtant être perçus comme une partie intégrante de l’apprentissage.
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À PROPOS DE L’AUTEUR(E)

Le Dr Nicolas Chevrier, psychologue, est titulaire d’une maîtrise en psychologie clinique et d’un doctorat en psychologie du travail et des organisations dans lequel il s’est intéressé aux impacts des facteurs organisationnels sur le développement de l’épuisement professionnel chez les travailleurs.
Nicolas Chevrier
À PROPOS DE
Il importe donc de changer notre attitude face à l’échec. J’en discutais dernièrement avec Nicolas Duvernois, fondateur de Pur Vodka. « Il faut que tu sois prêt à perdre, si tu veux gagner! ». Pour Nicolas, les échecs sont des occasions d’apprendre et de m’améliorer. Cette attitude est probablement la plus productive. Pour la développer, je vous présente quelques clés importantes.
D’abord, éviter l’évitement. Notre premier réflexe après le choc, la honte, la colère sera peut-être de tenter d’éviter le malaise ressenti face à cet échec. Il peut s’ensuivre plusieurs comportements malsains qui ont pour objectif d’éviter ces émotions: cacher l’échec à notre entourage, s’étourdir dans la drogue, l’alcool ou le travail, repousser des rencontres importantes avec les collègues, ne pas ouvrir les lettres de la banque, etc.

Or, pour bien gérer un échec, la meilleure stratégie c’est l’affrontement. Faire face à l’échec c’est difficile, mais avec le soutien moral de nos proches, de nos collègues, de notre réseau, on est moins seul. Une bonne dose d’humilité dans cette étape est importante afin d’aller chercher l’aide nécessaire. Affronter l’échec c’est en parler à nos amis, à nos collègues, c’est ouvrir immédiatement l’enveloppe que la banque nous a fait livré par huissier, de se présenter au 5 à 7 professionnel alors que tous sont au courant de notre échec. Attention aux pensées qui nous disent qu’on doit régler cette situation seul, elles vont souvent nous guider vers une voie beaucoup plus cahoteuse.
Ensuite, on regarde l’échec dans les yeux. Pour ça, on doit se poser les bonnes questions. Faire une analyse en profondeur des événements. Qu’est-ce qui a fonctionné ? Qu’est-ce qui n’a pas fonctionné ? Quels sont les facteurs qui ont fait échouer mon projet ?
Une fois ces facteurs identifiés, je dois déterminer quels sont ceux sur lesquels j’ai un contrôle et quels sont ceux sur lesquels je n’en ai pas. Avec les facteurs sur lesquels j’ai un contrôle, je dois me mettre en mode résolution de problème. On a sous-estimé la disponibilité de la main-d’œuvre ? Comment faire la prochaine fois pour s’assurer de prévoir les ressources financières permettant d’avoir une équipe des ressources humaines plus solide et efficace?
Les facteurs sur lesquels je n’ai pas de contrôle sont également importants. Je dois réussir à les identifier clairement et accepter que je n’aie pas de prise sur ceux-ci. L’acceptation est ici fondamentale. Lancer sans succès une nouvelle gamme de mitaines lors d’un hiver pluvieux; je n’ai pas de contrôle sur la météo. Je dois l’accepter.
Finalement, développer une saine stratégie de gestion de l’échec me permet de le dépersonnaliser. Comme tous les entrepreneurs, je vis des échecs, je ne suis pas un échec. Cette nuance est fondamentale: l’échec est un événement, pas mon identité.