
Alcool et drogue: plaisir ou automédication?
2020-02-17
4 minutes
Nicolas Chevrier
Psychologie du travail

Dr Nicolas Chevrier
Psychologie du travail
Les premiers mois de l’année peuvent être difficiles pour certains d’entre nous. On a peut-être pris des résolutions qu’on commence déjà à trouver difficiles. Une nouvelle tendance est perceptible depuis quelques années, les mois « sans alcool ». Dans le cadre de ce mois de février sans alcool (Dry February), je vous glisse quelques mots sur la relation, pas toujours saine, que les entrepreneurs entretiennent avec l’alcool.
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À PROPOS DE L’AUTEUR(E)

Le Dr Nicolas Chevrier, psychologue, est titulaire d’une maîtrise en psychologie clinique et d’un doctorat en psychologie du travail et des organisations dans lequel il s’est intéressé aux impacts des facteurs organisationnels sur le développement de l’épuisement professionnel chez les travailleurs.
Nicolas Chevrier
À PROPOS DE
Quand on sait que dans la population générale, 22,9% des individus ont une consommation abusive d’alcool (Enquête sur les collectivités canadiennes 2018) et que la relation entre le stress et la consommation d’alcool est démontrée depuis longtemps (Sinha, R. 2009), on peut facilement imaginer que cette question concerne les entrepreneurs. Et en effet, je le remarque également chez mes clients.

Sous pression
Le stress et la pression sont des parties intégrantes de la vie de plusieurs entrepreneurs. Lorsqu’on évolue dans un environnement stressant, notre corps est constamment sollicité, ce qui provoque l’activation du système nerveux sympathique. Or, cette activation constante devient lourde et peut avoir des conséquences physiques (fatigue, maux de dos, serrements de poitrine, etc.), psychologique (anxiété, irritabilité, sentiment de ne jamais y arriver, etc.) et interpersonnelle (irritabilité, colère, etc.).
Chacun trouve un moyen pour composer avec cette pression, certains font du sport ou du yoga. D’autres iront vers la méthode la plus simple, soit prendre une substance qui a un effet relaxant. C’est là que l’alcool entre en jeu. Car l’alcool est un dépresseur du système nerveux.
Quand on le consomme, on se sent bien. On sent la pression relâcher. On sent le stress s’envoler… C’est un peu comme si on nous avait donné un médicament contre le stress. En fait, ce n’est pas « comme si », c’est exactement ça !

S’automédicamenter
Ce phénomène, bien connu des professionnels de la santé, se nomme l’automédication. Plus tôt que d’aller vers des moyens naturels qui permettent de développer une gestion saine du stress, nous développons lentement des mauvaises habitudes de vie qui ont des impacts à long terme sur notre santé.
Aussi, puisqu’on ne développe pas des stratégies de gestion du stress saine, le recours à l’alcool reste notre stratégie principale et parfois même la seule et unique. Le danger de l’abus d’alcool devient donc bien réel. L’alcool répond ici à un besoin ciblé, celui de réduire le stress. Le risque de développer un problème d’alcool devient alors très important. Et, on le sait, l’abus amène son lot de problèmes: de couple, de productivité, de santé, de motivation et, dans certains cas, des problèmes de réputation.
Bien sûr, comme psychologue je ne prône pas l’arrêt de la consommation d’alcool. Je ne nie pas le plaisir ressenti en trempant les lèvres dans un Sauternes bien vieilli ou en savourant la dernière IPA du brasseur local. Je crois seulement qu’il est important de se poser la question lorsqu’on remarque que notre consommation d’alcool augmente. Est-ce que je prends ce verre parce que j’aime le goût, que j’ai envie de savourer ce vin ou est-ce que je consomme ce verre pour faire baisser la pression, pour me relaxer? Plaisir ou automédication? Si la réponse est la seconde, vous gagneriez certainement vous aussi à tenter un mois sans alcool, et encore mieux, développer une réflexion sur votre consommation d’alcool.
Activité pour remplacer facilement la consommation d’alcool
Pour ce faire, on tente de pratiquer des activités qui sont naturellement contraire à la consommation d’alcool, mais qui permettent quand même d’assurer un détachement si salutaire après une dure journée de travail.
1. Prévoir un sport d’équipe en semaine.
2. S’équiper pour un sport individuel que l’on pourra pratiquer au besoin (course en été, ski de fond en hiver, gymnase près de chez nous).
3. Jouer à un jeu vidéo qui demande des réflexes aiguisés (rarement possible sous l’effet de l’alcool).